L’enclos de Saint-Divy, malgré les restaurations réalisées ces dernières décennies, reste encore trop méconnu. C’est pourtant l’enclos paroissial de la vallée de l’Élorn le plus proche de Brest et l’un des plus riches.

Les dates 1500-1676 le situent bien dans la grande période des enclos et de la richesse toilière.

Les trois croix marquent l’entrée de l’enclos comme à Pencran. Il est vrai qu’il n’y a plus d’ossuaire — démoli au début du XXe siècle — et que le traditionnel « porche Sud » est au nord !
 
 
L’intérieur recèle des richesses que l’on aurait tort d’ignorer :

  • Les retables font partie des très beaux retables du XVIIe siècle.
  • Les peintures des lambris. Dans l’ouvrage de Maud Hamoury, La peinture religieuse en Bretagne aux XVIIe et XVIIIe siècles, une étude est consacrée aux lambris de Saint-Divy qui dépeignent six scènes de la vie du saint. Les peintures datent de 1676 ; elles ont été restaurées en 1998.
  • Le maître-vitrail de 1531 figure parmi les plus anciens de la vallée de l’Elorn.

 

Autour de l’église

Le placître
Il y a un siècle, A. de Lorme évoquait le placître boisé à l’est de l’enclos. Ces arbres constituaient une provision de bois en vue d’une éventuelle réfection de la charpente. Aujourd’hui, quelques chênes multicentenaires ont survécu, d’autres ont été remplacés pour sauvegarder en partie le décor bucolique du bourg.

La fontaire
La fontaine dédiée à saint Divy, située primitivement à une cinquantaine de mètres au nord de l’église, a été déplacée en contrebas à la fin du XXe siècle. La croyance populaire lui attribuait le pouvoir de guérir certaines maladies des enfants. Saint Divy est réputé comme un saint guérisseur en de nombreux lieux de Bretagne. Ici comme ailleurs, il s’agit vraisemblablement de croyances pré-chrétiennes, "christianisées" par les premiers évangélisateurs.
 
 

Les stèles gauloises
Il existe d’autres indices d’un culte ancien. L’enceinte du cimetière héberge quatre stèles gauloises. Elles datent du second Age du Fer, entre le VIe et le IIIe siècle avant J.C.. Bien que leur rôle premier reste assez mystérieux, les archéologues s’accordent à penser que ces stèles étaient associées à des rites funéraires. On observera que l’une d’elles a été réemployée comme socle de croix et une autre comme bénitier.
 
 
L’ossuaire disparu
En 1904, J.M. Abgrall note « dans le cimetière, un petit ossuaire à deux compartiments, surmonté d’une croix qui porte cette date en caractère gothiques : Le premier jour de Juin, lan mil Vc VI » [1506].
En 1910, A. de Lorme signalait également la présence de l’ossuaire et mentionnait la même date. Ce dernier a disparu au début du XXe siècle, sans doute victime d’un aménagement du cimetière.
 
 

Les calvaires

Le calvaire d’entrée donne une solennité sans prétention à la porte de l’enclos. Il porte la date de 1562. Emmanuelle Le Seac’h (Sculpteurs sur pierre en Basse-Bretagne) considère qu’il a été réalisé par Henry Prigent. L’atelier de Bastien et Henry Prigent a été actif à Landerneau de 1527 à 1577.
C’est un ensemble de trois croix édifiées sur les pilastres de l’entrée est. Sur les anciennes cartes postales, il apparaît sur l’entrée opposée, au nord-ouest du cimetière. Il a été déplacé pour permettre l’élargissement de la rue ouest au cours du XXe siècle. C’est la raison pour laquelle le Christ est aujourd’hui tourné vers l’est, contrairement à la tradition. Le fût en granit de la croix du Christ, de section ronde, est pourvu d’écots qui évoqueraient les bubons de la peste et les épidémies des siècles passés. Les statues sont en kersanton.

Sous le Christ, une statue de saint Divy en ornements épiscopaux accueille les fidèles.
Sur le socle, une Marie-Madeleine à genoux pleure de douleur en regardant le Christ. Près d’elle est posé son attribut, un vase de parfum. Ses cheveux dénoués retombent sur ses épaules et son châle a glissé sur son dos. Du côté du cimetière, au niveau du croisillon, un écusson porte les armes des Rohan dont l’une des neuf macles a été martelée, sans doute pendant la Révolution. Juste au-dessus, une Vierge de douleur (pietà) et, plus haut, au revers du Christ en croix, un Christ aux liens (ou Ecce Homo).
Les larrons sont représentés de manière traditionnelle : le bon larron regarde vers le Christ, tandis que le mauvais larron détourne le regard.
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Le second calvaire du XVIIe siècle, au centre du cimetière, provient du hameau de Kerdalaes, à la limite de Saint-Divy et de Guipavas. Les pieds du Christ reposent sur une tête de mort qui évoque le lieu de la crucifixion, le Golgotha en Hébreu, c’est-à-dire le “Lieu du Crane”. Sur le croisillon portant les statues de la Vierge et de saint Jean on peut lire à l’avers l’inscription : « MATER ECCE FILIVS TVVS » (Mère, voici ton fils) et au revers : « FRANCOIS TONCQVES ». Sur le socle est inscrite la date « 1652 ».

L’écu est malaisé à déchiffrer, en raison du lichen et de l’érosion de la pierre. Le site "Les généalogistes du Finistère" y est parvenu : il s’agit d’un blason d’alliance mi-parti comprenant :
– à dextre les armes de Yves de La Marche, seigneur de Kerfors, "de gueules au chef d’argent"
– à sénestre celles de son épouse Marie de Kersaintgilly, "de sable à 6 trèfles d’argent 3.2.1.".

La famille de Kersaintgilly possédait de nombreuses terres dont celles de Kerdalaes au XVIe siècle. Par son mariage avec Marie de Kersaintgilly en 1600, Yves de La Marche devint seigneur de Kerdalaes. (1)
On ne sait à quelle date François Toncques (parfois orthographié Toucques, ou Doncques) acquit Kerdalaes. Avant 1650, semble-t-il, puisque deux actes de baptême de 1649 – à Landerneau et Guipavas – citent comme parrain "François Doncques, sieur de Kerdalaes".

On peut en conclure que le calvaire a été commandité par les conjoints de La Marche & de Kersaintgilly, qui y ont apposé leur blason d’alliance. Leur successeur, François Toncques, a fait graver son nom au revers du croisillon et vraisemblablement inscrire 1652 sur le socle. Cette date n’est donc pas celle de la réalisation du calvaire qui se serait plutôt faite au début du XVIIe siècle.

Ce calvaire a remplacé en 1967 une croix de mission en bois de 1882 qui menaçait de s’écrouler. Mais la première croix connue était un calvaire du XIVe (?) siècle, dont les restes avaient été enterrés dans le jardin du presbytère et découverts en 1920 par un séminariste. Après la guerre, il fut restauré et transféré en 1947 à Vesly (Eure) dont notre ancien séminariste était devenu le curé !

(1) Yves de La Marche et Marie de Kersaintgilly sont les trisaïeux de Mgr Jean-François de La Marche, né à Ergué-Gabéric en 1729 et décédé en exil à Londres en 1806. Il fut le dernier évêque du diocèse de Léon.