Ossuaire de Saint-Servais (il a servi d’atelier à Yan’ Dargent)

Construction servant à recueillir les ossements des défunts.

Le terme d’ossuaire est d’invention récente. Jusqu’à la fin du XIXe siècle on les appelait des "reliquaires". En breton on disait "ar garnel" (le charnier). Curieusement, ils prennent le nom d’ossuaire alors même que l’on n’y met plus d’ossements.

Leur histoire est associée aux rites d’inhumation des défunts. Au Moyen-Age, le haut clergé et les familles nobles prééminentes pouvaient disposer, à l’intérieur de l’église, d’un enfeu, c’est-à-dire d’une tombe familiale adossée à un mur. La population, quant à elle, était inhumée à l’extérieur, autour de l’église. Peu à peu, les donateurs obtinrent à leur tour le droit d’avoir une sépulture dans l’église. Il ne s’agit pas d’une spécificité bretonne mais d’un usage que l’on retrouve dans les différentes régions françaises. La population pensait s’attirer ainsi le regard bienveillant de Dieu dans l’au-delà !

En Bretagne, l’inhumation dans l’église se développe dans la première moitié du XVIIe siècle et se démocratise même vers la fin du XVIIe siècle, moyennant le paiement d’un droit de plus en plus élevé à mesure que l’emplacement se rapproche du chœur. L’exiguïté des édifices contraint à retirer les ossements plus anciens pour laisser la place aux personnes récemment décédées. Les reliques enlevées étaient alors déposées dans l’ossuaire.

Les plus anciens de ces ossuaires datent du XVe siècle. A l’origine, il s’agit de petits bâtiments isolés dans le cimetière ou accolés à l’église (ossuaires d’attache). Leur façade, entièrement ajourée pour favoriser l’aération, ne possède ni vitre ni porte. Les passants peuvent voir les ossements entassés, les asperger d’eau bénite et méditer sur la vanité de ce monde. A partir du XVIe siècle, les ossuaires s’agrandissent, deviennent des éléments essentiels des enclos et bénéficient d’enrichissements architecturaux, comme à Plougonven, Pleyben, Sizun, Guimiliau, La Martyre, La Roche Maurice, etc. Certains d’entre eux ne se contentent plus de recevoir les ossements mais servent également de lieux de prière et de veillée.

Néanmoins les inhumations dans les églises créent des désagréments : dallage instable et odeurs de putréfaction. En 1689, le Parlement de Bretagne s’inquiète de l’état des dallages des églises. L’évêque de Quimper, en 1710, demande que les sépultures soient gratuites dans les cimetières
extérieurs et défend au clergé « d’inhumer aucune personne dans les églises, à la réserve de ceux qui y ont leur enfeu ». Ces interdictions ont peu d’effet, puisqu’en 1719 le Parlement de Bretagne doit réitérer son interdiction en invoquant cette fois le danger des épidémies. Mais il devra le refaire de nouveau en 1741… Et on continue à citer des exemples d’inhumations dans les églises jusque dans les années 1760-70, donnant lieu à des incidents avec les autorités. La déclaration royale de Louis XVI le 10 mars 1776 interdit l’inhumation dans l’église sauf pour les hauts dignitaires. En juillet 1790, l’Assemblée Nationale confirme l’interdiction. A partir de cette date, les infractions deviennent rares.
Dans les cimetières, l’espace est plus important et les transferts d’ossements sont moins nécessaires. Les ossuaires perdent donc leur utilité première. Quelques-uns seront démolis. Certains conserveront encore pour un temps les restes des défunts, d’autres seront transformés en chapelles, en habitations (Saint-Thomas de Landerneau) ou serviront d’école (La Roche-Maurice)… Plus récemment, des communes y ont créé de lieux pour la promotion du patrimoine.