A l’époque gothique le chœur était clos pour la célébration du culte, séparé de l’assistance par le jubé et les chancels. L’animation (chant, lecture) se faisait de la tribune du jubé.
À la suite du concile de Trente (1545-1563), l’Église s’est engagée dans un nouvel élan missionnaire. Concernant l’aménagement des églises, l’une des consignes était de dégager le lieu de la célébration liturgique en enlevant les jubés et en les remplaçant par les chaires à prêcher. A la Roche-Maurice, le jubé est resté à sa place. Peut-être les habitants ne se sentaient-ils pas concernés par la décision du Concile. Néanmoins une chaire à prêcher a été installée.
Le décor du jubé
Il est surprenant de voir ici tout le vocabulaire de la Renaissance : pendentifs, cartouches grotesques, personnages engainés, etc. avec des faciès négroïdes et amérindiens et ceci dans les années 1520-1540. S’en étonner c’est oublier qu’au temps des Pays-Bas espagnols, où le lien essentiel entre les continents était la navigation, la Bretagne était au centre de l’Europe.
Le jubé côté nef
II s’agit d’une œuvre très élaborée, par un artiste de grand talent. Outre sa fonction de clôture du chœur et de tribune, elle donne aux fidèles comme aux passants, matière à contemplation.
Le Christ en croix, avec Marie et saint Jean, domine l’ensemble.
La tribune porte douze statues en applique : trois sont coiffées de la tiare papale. La main ouverte, ils annoncent la Parole.
Les neuf autres, le Livre sous le bras, portent les insignes qui les désignent traditionnellement : de gauche à droite :
- Philippe, la croix latine ;
- André, la croix en X,
- Thomas, l’équerre ;
- Matthias, la hache ;
- Matthieu, la balance ;
- Jacques le Mineur, le foulon ;
- Thaddée (Jude), la masse ;
- Simon, la scie ;
- Jacques le Majeur, la coquille et le bâton.
Des cariatides grotesques, lion gorgone à figure humaine. ainsi que les personnages engainés au sommet de l’encorbellement, restent très énigmatiques. Certains font penser à des masques amérindiens comme ceux qui ornent le catafalque de Trémaouezan.
Des angelots portent les instruments de la passion. Sous la claire-voie un sous-bassement plein d’entrelacs avec quatre statues ; à gauche deux personnages de théâtre : une femme avec un instrument de musique, un homme au chapeau à plumes, une cape retenue par la main ; à droite un personnage à tête de singe portant sur le bas ventre un masque hurlant et une femme grotesque.
On peut lire cet ensemble comme des expressions plus ou moins caricaturales de la condition humaine que la Parole portée par les Apôtres vient évangéliser.
Le jubé lui-même est encadré par deux niches accrochées aux piliers.
A droite, sainte Anne tient un livre en main. Marie a les mains disposées comme si elle présentait Jésus.
A gauche, sainte Marguerite, dans une attitude de prière paisible, sort d’un dragon ailé à tête humaine.
Le jubé est surmonté du Christ en croix, entouré de Marie, sa mère et du disciple bien-aimé, saint Jean : figure ultime d’une humanité élevée jusqu’aux sommets, de la dérision jusqu’à la gloire.
Le jubé côté chœur
Douze statues adossées à la tribune, de gauche à droite :
- St Pol de Léon - l’évêque fondateur du Diocèse - avec son dragon.
- Un autre évêque.
- Saint Christophe, portant l’enfant.
- Saint Michel terrassant Satan.
- Madeleine avec son vase de parfum.
- Le Christ ressuscité.
- Sainte Catherine d’Alexandrie tenant l’épée de son martyre.
- Sainte Barbe avec la tour.
- Sainte Appoline avec les tenailles.
- Saint Antoine l’Ermite avec sa canne et son chapelet.
- Sainte Geneviève de Paris ou plutôt de... Loqueffret, tenant un cierge.
- Sainte Marguerite sortant du dragon.
Nota - Le jubé tient son nom des premiers mots de la formule latine « Jube, Domine, benedicere » (Daigne, Seigneur me bénir) qu’employait le lecteur avant les leçons de Matines.