Daté de 1676, cet ensemble a été classé aux Monuments Historiques le 10 novembre 1906. Il a été restauré en 1960 par l’atelier Maimponte à Bagnolet.
 

Le bas-côté nord de l’église de Lampaul-Guimiliau, nous présente une sculpture de la mise au tombeau de Jésus, scène du dernier épisode de la Passion du Christ.

Cette stature polychromée est figurée en taille réelle — 2 × 4 mètres — et est sculptée dans la pierre blanche de tuffeau (carrières de la vallée de la Loire, de Touraine et d’Anjou), seul matériau de l’œuvre qui ne soit pas d’origine bretonne.

Le modèle a été exécuté et signé par Antoine Chavagnac, sculpteur de la Marine de Brest, au XVIIe siècle :
« ANTHOINE : FECIT » gravé dans le linceul.
L’inscription, empreinte dans le socle entre la frise de feuilles de chêne et la draperie, de part et d’autre du gros crâne, cite premièrement le recteur de Guimiliau, la paroisse-mère, puis le vicaire de la trève :
« M : H : GVILLERM : R : M : C : ABGRALL : CVRE »
« FAIT:F:PAR-I-LEC-AT:H-POVLIQVEN FABRIQVU 1676 ».
 
 
Huit personnages entourent le corps mort de Jésus (de gauche à droite) :

  • Nicodème qui porte la couronne d’épines, l’un des attributs avec lequel il est traditionnellement.
  • Salomé , mère de l’apôtre Jean.
  • Marie de Magdala qu’on identifie par le vase à nard qu’elle tient. Habituellement représentée les cheveux longs et dénoués, ainsi que partiellement dévêtue, elle est ici, comme à certaines exceptions, imagée les cheveux attachés, les bras et le buste couverts.
  • La Vierge Marie , figurée depuis le XIIe siècle (et au-delà même de la période baroque du doré) avec une tunique bleue.
  • Jean l’apôtre, soutenant la mère éplorée.
  • Marie , mère de Jacques.
  • Gamaliel .
  • Joseph d’Arimathie , tenant le linceul qu’il a acheté pour envelopper le corps de Jésus.
     
    Qui est Gamaliel ?

Cité dans le Talmud juif et dans l’œuvre proromaine de Flavius Joseph, La Guerre des Juifs, Gamaliel est évoqué dans les Actes des Apôtres.
Lorsque les apôtres continuent de prêcher dans le Temple malgré les interdictions à leur encontre, il réussit à convaincre le conseil du sanhédrin de ne pas condamner à mort les disciples de Jésus, qui furent donc maltraités au fouet mais libérés.
Le Nouveau Testament nous apprend aussi que c’est de Gamaliel que Paul de Tarse reçu son éducation de la Loi.
 

Le récit du tombeau d’après les évangiles synoptiques (Ier siècle)
Matthieu 27, 57-61 Marc 15, 42-47 Luc 23, 50-56 Jean 19, 38-42
55 Il y avait là bien des femmes qui regardaient de loin ; elles avaient accompagné Jésus depuis la Galilée pour le servir.
56 Parmi elles figuraient Marie de Magdala, Marie la mère de Jacques et de Joseph, et la mère des fils de Zébédée.
40 Il y avait aussi des femmes qui regardaient de loin. Parmi elles étaient Marie de Magdala, Marie, mère de Jacques le jeune et de Joses, ainsi que Salomé,
41 qui le suivaient et le servaient lorsqu’il était en Galilée, et beaucoup d’autres femmes qui étaient aussi montées avec lui à Jérusalem.
49 Tous ceux qui connaissaient Jésus, et en particulier les femmes qui l’avaient accompagné depuis la Galilée, étaient restés à distance et regardaient ce qui se passait.
57 Le soir venu arriva un homme riche d’Arimathée, du nom de Joseph, qui lui aussi était un disciple de Jésus.
58 Il alla trouver Pilate et demanda le corps de Jésus. Alors Pilate ordonna de le lui remettre.
42 Le soir venu, comme c’était le jour de la préparation, c’est-à-dire la veille du sabbat,
43 Joseph d’Arimathée arriva. C’était un membre éminent du conseil, qui attendait lui aussi le royaume de Dieu. Il osa se rendre vers Pilate pour demander le corps de Jésus.
44 Pilate s’étonna qu’il soit déjà mort ; il fit venir l’officier et lui demanda si Jésus était mort depuis longtemps.
45 Une fois renseigné par l’officier, il fit remettre le corps à Joseph.
50 Il y avait un membre du sanhédrin du nom de Joseph ; homme bon et juste,
51 il ne s’était pas associé à la décision et aux actes des autres. Il était d’Arimathée, ville des Juifs, et il attendait lui aussi le royaume de Dieu.
52 Il alla trouver Pilate et demanda le corps de Jésus.
38 Après cela, Joseph d’Arimathée, qui était disciple de Jésus, mais en secret par crainte des chefs juifs, demanda à Pilate la permission d’enlever le corps de Jésus. Pilate le lui permit. Il vint donc et enleva le corps de Jésus.
39 Nicodème, l’homme qui auparavant était allé trouver Jésus de nuit, vint aussi. Il apportait un mélange d’environ 30 kilos de myrrhe et d’aloès.
59 Joseph prit le corps, l’enveloppa dans un drap de lin pur
60 et le déposa dans un tombeau neuf qu’il s’était fait creuser dans la roche. Puis il roula une grande pierre à l’entrée du tombeau et s’en alla.
46 Joseph acheta un drap de lin, descendit Jésus de la croix, l’enveloppa dans le drap de lin et le déposa dans un tombeau taillé dans la roche. Puis il roula une pierre à l’entrée du tombeau. 53 Il le descendit de la croix, l’enveloppa dans un drap de lin et le déposa dans un tombeau taillé dans la roche, où personne n’avait encore été mis.
54 C’était le jour de la préparation du sabbat, le sabbat allait commencer.
40 Ils prirent donc le corps de Jésus et l’enveloppèrent de bandelettes, avec les aromates, comme c’est la coutume d’ensevelir chez les Juifs.
41 Or, il y avait un jardin à l’endroit où Jésus avait été crucifié, et dans le jardin un tombeau neuf où personne encore n’avait été mis.
42 Ce fut là qu’ils déposèrent Jésus parce que c’était la préparation de la Pâque des Juifs et que le tombeau était proche.
61 Marie de Magdala et l’autre Marie étaient là, assises vis-à-vis du tombeau. 47 Marie de Magdala et Marie la mère de Joses regardaient où l’on déposait Jésus. 55 Des femmes qui étaient venues de la Galilée avec Jésus accompagnèrent Joseph. Elles virent le tombeau et la manière dont le corps de Jésus y fut déposé.
56 Puis elles repartirent et préparèrent des aromates et des parfums. Le jour du sabbat elles se reposèrent, comme le prescrit la loi.

 
Novum testamentum in vetere latet, vetus in novo patet
(Le Nouveau Testament est caché dans l’Ancien, l’Ancien est révélé dans le Nouveau),
Saint Augustin.

Il s’agit pour l’Eglise, de transmettre à ses fidèles, par une mise en relation des deux textes fondateurs, le message selon lequel les évangiles sont l’accomplissement et la réalisation des prophéties des anciens passages bibliques.

Dans l’art paléochrétien, la mise au tombeau est représentée à travers l’histoire de Jonas. Cet art iconographique s’exprime de façon symbolique dans les catacombes à Rome à partir de la fin du IIe siècle, début du IIIe siècle.

Mise au tombeau : Jonas, avalé par une baleine ou un monstre marin.
Résurrection : Par le pardon de Dieu, Jonas est recraché.

Fresques des catacombes des Saints-Marcellin-et-Pierre, Rome. Photo : Vatican

On retrouve les aventures du prophète Jonas dans l’Ancien Testament, Livre des prophètes, Jonas, chap 1 à 4.

Jonas avait mission par l’Eternel de transmettre le message divin aux assyriens, les ennemis des hébreux. Mais il a fui son Dieu à bord d’un bateau à Jaffa en direction de Tarsis. Par sa faute, un malheur divin tomba sur le bateau et la mer se déchaîna. Jonas fut désigné au sort par l’équipage comme étant la cause de ce malheur et fut jeté par-dessus bord. Dans la mer, un gros poisson l’avala. Il restera trois jours et trois nuits à l’intérieur de l’animal.
Cette histoire est reprise dans Matthieu 12,39-41.

L’histoire de Jonas symbolise la pénitence face à Dieu et Jésus s’en sert dans sa prédication pour montrer qu’il est le libérateur attendu. Il annonce par cela sa mort et sa résurrection.

L’art gothique d’Europe Occidentale commence à représenter la Mise au Tombeau à partir du XIIIe siècle.
L’épisode est aussi illustré dans la Biblia Pauperum.


Biblia Pauperum : Mise au Tombeau et Résurrection sont assimilées en correspondance.

L’art religieux italien du XIVe siècle ne représente plus l’enfance de Jésus mais désormais sa vie publique puis sa mort. Cette nouveauté va inspirer les artistes des royaumes voisins, les italiens étant invités à la cour des rois de France,

La scène de la Mise au Tombeau est couramment figurée à partir du XVe siècle lors des mystères (ou mistères, misterium qui signifie « cérémonie » et qui est un genre théâtral composait de tableaux animés et dialogués) autour de La Passion du Christ.

Les peintres et sculpteurs sont influencés par le théâtre et en reprennent les codes des costumes et des décors.

Tous ces artistes qui avaient jusqu’alors recours aux Evangiles synoptiques et apocryphes, ainsi qu’à La Légende dorée, découvrent une poésie dramatique : les Méditations sur la vie de Jésus de Saint Bonaventure (imagination de dialogues entre Jésus et son entourage). Ils peuvent ainsi élargir leurs sources d’inspiration.

C’est ainsi que les flamands et allemands représentent Nicodème et Joseph d’Arimathie tout deux vêtus d’une belle étoffe, incarnation de la bourgeoisie du XVe siècle. Tandis que l’un porte une longue barbe, l’autre n’en porte pas et est chauve. L’exception demeure pour les artistes français qui ne se sont pas prêtés à cette tradition et ont représenté les deux personnages d’un âge avancé et barbus.

D’autres personnages s’ajoutent à la scène, tels que des soldats, Sarrazins ou anges.