Il s’agit sans doute du retable le plus imposant de la région avec 6,20 mètres de largeur et 8 mètres de hauteur, réalisé à la fin de la prospérité bretonne. Deux cartouches portent l’inscription “FAIT : DU : TEMPS : DE : MISSIRE : YVES : MESSAGER : RECTEUR : LAN : 1682” (et non 1662, comme l’indiquent certains commentateurs). On sait également qu’il a été peint en 1691 par Pierre de Lesmeur (ou Mesmeur), “maître-peinteur et doreur résidant au Huelgoat”. Par contre, nous ne connaissons pas les noms des artistes qui ont sculpté le retable.
Il est admis que ce retable et les fonts baptismaux ont été financés par les paroissiens en réparation des brutalités qui furent infligées en 1675 au recteur Yves Croguennec par certains habitants qui l’accusaient à tort de détenir l’argent de la gabelle... Cet incident se situe dans le climat d’agitation sociale de la révolte des Bonnets Rouges et de la récession économique qui étranglait peu à peu l’industrie toilière bretonne.
En découvrant ce retable, on est d’abord frappé par la luxuriance de l’ornementation baroque. Les guirlandes de vignes et de fleurs, les angelots et les arabesques sont partout présents.
Dans le tympan est représentée la Sainte Trinité : sous une colombe dorée, le Père Eternel, en manteau rouge et coiffé d’une tiare, porte le corps du Fils ressuscité dont les pieds sont posés sur un globe. Juste en-dessous, un écusson porte les armes des Bouvans, seigneurs du Bois de la Roche. Cet ensemble est encadré par des statues de la Vierge et de l’archange Gabriel, tous deux agenouillés.
La scène centrale est composée de deux statues que les chanoines Abgrall et Peyron désignent comme étant celles de la Vierge et de sainte Anne, assises de chaque côté d’un Enfant-Jésus debout au-dessus du tabernacle et tenant le globe terrestre.
Cependant, le Père Claude Chapalain, faisant une autre lecture de cette scène, pense que les deux statues représentent la Vierge : à gauche Marie dans l’attente de l’enfantement, à droite Marie qui vient d’offrir son Fils au Père [1].
Au même niveau, les niches latérales à coquille sont occupées par saint Joachim et saint Joseph. Les gradins et les pieds des colonnes sont ornés de panneaux et de médaillons représentant des angelots, Jésus bénissant, la Vierge, saint Joseph, un évêque, saint Yves, Jean-Baptiste et Jésus enfants... Sur le tabernacle quatre statuettes des Vertus supportent un dais sous lequel apparaît une crucifixion.
Sur le coffre de l’autel, un grand médaillon présente une scène de l’enfance de la Vierge : sainte Anne fait lire Marie. Mais le Père Chapalain y voit plutôt la Vierge et l’Enfant-Jésus. De chaque côté, sur deux autres médaillons, des anges tiennent les armes des Bouvans.
[1] Un joyau au coeur des enclos bretons - Commana un retable à revisiter - Claude Chapalain - Diffusion Coop Breizh